1421160 1355 886d6e9aa05ea71cb735965b3650b997 Sur ces questions, la décision ne peut être unilatérale, car elle implique une multitude d’acteurs. À titre d’exemple, si nous avions la possibilité de voter une telle interdiction – nous ne le sommes pas, comme je vous l’indiquerai dans quelques instants –, quelles solutions alternatives serions-nous en mesure de proposer aux agriculteurs producteurs de maïs, de colza, d’orge ou de blé d’hiver qui ont aujourd’hui recours à ce type de produits ? Nombre d’entre eux s’inquiéteraient de cette interdiction de principe et dénonceraient une distorsion de concurrence entre eux et le reste des agriculteurs européens.Bien évidemment, si un enjeu de santé publique majeur est constaté, il faut agir vite, et nous l’avons déjà fait. Mais si tel n’est pas le cas, il faut privilégier le dialogue pour faire bouger les lignes dans la durée. C’est en ce sens que s’est engagée la France depuis plusieurs années sur la scène européenne, et je tiens à saluer en cet instant votre travail à cet égard, monsieur le ministre.Je rappelle que la réglementation européenne ne permet pas aux États membres d’autoriser ou d’interdire une substance active, en l’occurrence les néonicotinoïdes. Les États membres ont seulement la possibilité de se prononcer sur les produits en eux-mêmes. Et nous avons déjà usé de cette faculté ! Dès le mois de juin 2012 – les auteurs de la proposition de résolution l’admettent –, la France a été en première ligne sur ce sujet, en interdisant tout d’abord au plan national le Cruiser OSR, puis en introduisant à l’échelon européen une procédure visant à interdire les semis de colza traités par enrobage au thiaméthoxam.En mai 2013, la réglementation européenne a encadré l’utilisation des néonicotinoïdes. Avec le fort soutien de la France, la Commission européenne a ainsi restreint l’utilisation de trois des cinq substances actives de cette famille de pesticides du fait de leur nocivité sur la population d’abeilles. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er décembre 2013 et une révision de la dangerosité de ces produits doit avoir lieu d’ici à deux ans. Pour ce qui concerne les deux substances actives toujours autorisées en raison d’une dangerosité bien moindre à l’égard des insectes pollinisateurs, une réévaluation du risque de leur utilisation pour les abeilles sera conduite dans le cadre du réexamen général de l’approbation de ces substances à l’échelle européenne. Je crois savoir, monsieur le ministre, que vous vous engagerez afin que cette réévaluation intervienne rapidement, ce dont nous nous félicitons !Par ailleurs, au mois de juin 2013, l’Autorité européenne de sécurité des aliments a proposé un cadre révisé de l’évaluation du risque des produits phytosanitaires. Ce cadre prend en compte de manière plus large le risque pour les abeilles domestiques et certains pollinisateurs sauvages. Comme le ministre le confirmera certainement, les autorités françaises participent activement aux travaux s’orientant vers ces nouvelles lignes directrices.La France est donc clairement engagée au plan européen sur la question des pesticides. Le dialogue est parfois difficile sur ce sujet, vous pourrez nous le confirmer, monsieur le ministre. II faut donc éviter d’envoyer des signaux radicaux qui pourraient être contreproductifs, notamment vis-à-vis de nos partenaires européens. En outre, conformément à l’engagement du Président de la République, il faut cesser de « surtransposer » les directives européennes. Nous sommes nombreux, sur toutes les travées de cet hémicycle, à partager ce constat. Le monde agricole y est aussi particulièrement attentif.Parallèlement, à l’échelon national, une démarche globale du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt a été engagée pour encadrer davantage les produits phytosanitaires et protéger les insectes pollinisateurs. Le plan de développement durable de l’apiculture, lancé le 8 février 2013, vise à diminuer la mortalité des abeilles, à soutenir la recherche dans le domaine apicole, à structurer le développement du cheptel français, à encourager l’installation et à organiser la filière. Le plan Écophyto, qui prévoit la réduction de l’usage des pesticides d’ici à 2018, sera également révisé et adapté dans le courant de la présente année. Dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, des avancées significatives ont été votées en matière d’encadrement de l’utilisation des pesticides et de promotion d’une agriculture plus durable.J’évoquerai en cet instant l’une des plus emblématiques, à savoir le transfert de la compétence de délivrance des autorisations de mise sur le marché de produits phytosanitaires, des matières fertilisantes et des adjuvants à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, pour plus d’efficacité et d’objectivité. Les ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement ou de la santé pourront continuer à prendre des mesures de restriction ou d’interdiction de ces produits en cas de risque avéré pour la santé publique et l’environnement. Ils garderont leur rôle pour ce qui concerne la définition des risques acceptables, l’approbation des substances actives au plan communautaire, ou encore la mise en œuvre de politiques publiques à travers le plan Écophyto.Par ailleurs, un comité de suivi des autorisations de mise sur le marché est créé au sein de l’ANSES. Il aura vocation à faire la synthèse de l’ensemble des éléments d’appréciation permettant de prendre des décisions fondées sur l’intérêt public, tout en assurant la cohérence des actions à mener une fois les autorisations délivrées.De plus, la loi précitée consacre le projet agroécologique, qui vous est cher, monsieur le ministre, dont la définition désormais inscrite dans le code rural est la suivante : un système de production qui doit privilégier « l’autonomie des exploitations agricoles et l’amélioration de leur compétitivité […]en réduisant la consommation d’énergie, d’eau, d’engrais, de produits phytopharmaceutiques et de médicaments vétérinaires, en particulier les antibiotiques. » La création des groupements d’intérêt économique et environnemental incarne ce projet, et permettra une modification durable de nos systèmes de production.Il faut également noter l’instauration, sur l’initiative du groupe socialiste du Sénat, d’un dispositif de phytopharmacovigilance, dont l’objet est de surveiller les effets indésirables des produits phytosanitaires sur l’homme et l’environnement. Toujours sur notre initiative, ce dispositif a été étendu à la santé des abeilles domestiques.Le groupe socialiste du Sénat a également établi le principe d’une présentation par l’ANSES d’un rapport annuel au Parlement rendant compte de ses activités relatives à l’évaluation, la mise sur le marché et le suivi des effets sur la santé après leur mise sur le marché des produits.La loi oblige par ailleurs les détenteurs d’agréments à participer à la réalisation des objectifs du plan Écophyto, renforce la traçabilité des produits phytosanitaires, ou encore exige que les distributeurs délivrent un conseil global, spécifique et individualisé à tous les utilisateurs professionnels.Finalement, mon groupe a interdit l’usage de substances dangereuses pour la santé ou l’environnement dans les aires d’alimentation des captages d’eau potable. Des dispositions de protection ont également été prises pour les zones situées à proximité d’établissements recevant des publics sensibles, comme les hôpitaux et les maisons de santé.En conclusion, je le répète, le groupe socialiste, dans sa grande majorité, ne soutiendra pas cette proposition de résolution. 1720 http://www.senat.fr/seances/s201502/s20150204/s20150204_mono.html#intv_par_309 12036 48440 loi 2015-02-04 206 2015-02-08 04:14:24 2015-02-08 04:14:24 http://www.nossenateurs.fr/seance/12036#inter_886d6e9aa05ea71cb735965b3650b997