1132920 749 88612db29ec5531f9bb59d08828a2b9c Au lieu de rejeter les brevets sur les plantes, on a recouru à la notion, très contestable scientifiquement et très fragile juridiquement, de « variété essentiellement dérivée », afin d’interdire le dépôt d’un COV sur une variété dite « nouvelle » dans laquelle on aurait seulement modifié un gène.Ce faisant, on a changé d’approche. Jusque-là, la variété nouvelle, pour être couverte par un COV, était établie en fonction de la façon dont elle poussait, des caractères qu’elle développait. Avec la « variété essentiellement dérivée », on a pris en compte ce que la variété contenait génétiquement pour déclarer si elle était nouvelle, ou non.On se souvient de l’affaire du gène de résistance de la laitue au puceron, qui illustre à merveille les dangers de cette approche. Ce caractère de résistance, devenu incontournable, concerne près de 90 % des variétés de laitues commercialisées. Une entreprise hollandaise, Rijk Zwaan, avait mis au point, par un procédé de sélection assistée par marqueurs, des salades résistant au puceron Nasanovia. Le trait conférant cette résistance avait été identifié dans une espèce sauvage, Lactusa Virosa. L’entreprise néerlandaise avait ensuite obtenu un brevet protégeant la manière d’obtenir ce caractère par une méthode originale, qui permet de casser la liaison génétique entre le caractère de résistance et le caractère de nanisme qui, selon le brevet, lui était systématiquement attaché.Or, bien avant, une entreprise française, Gautier Semences, avait sélectionné avec l’appui de l’INRA d’Avignon des lignées de laitues contenant ce même trait, sans problème lié au nanisme des salades. Elle n’avait déposé aucun brevet.Forte de son brevet, la société hollandaise a demandé aux sélectionneurs de semences potagères d’acquitter des redevances pour continuer à utiliser ce trait. Au départ, les obtenteurs sont restés solidaires et ont décidé de saisir la justice pour contester et faire annuler le brevet. Finalement, il semble que la société ait trouvé des accords financiers avec l’ensemble des semenciers, sauf Gautier Semences qui, en raison de sa taille, ne pouvait ni payer les droits sur le brevet ni financer un procès.À la lumière de cette expérience, il nous apparaît fondamental non seulement de ne pas accepter de tels brevets, mais également de créer les forces juridiques nécessaires, de mutualiser les efforts pour que les agriculteurs et les semenciers ne soient pas isolés face à de telles agressions commerciales.Au début des années 1990, la protection du COV a été également étendue au-delà de la « production à des fins d’écoulement commercial » des semences ou des plants, à leur reproduction, qu’elle soit destinée à la vente, comme dans le passé, ou à l’utilisation à la ferme.Le règlement communautaire de 1994, précise les contours et le contenu du nouveau statut des semences de ferme : celles-ci deviennent des dérogations facultatives et limitées aux droits de l’obtenteur.Le règlement interdit les semences de ferme pour la plupart des espèces cultivées et les autorise pour vingt et une espèces – plantes fourragères, céréales, oléagineux, lin ou pommes de terre –, sous réserve du paiement d’une rémunération équitable à l’obtenteur, dont sont exonérés les petits agriculteurs – au sens de la PAC, il s’agit de ceux produisant l’équivalent de 92 tonnes de céréales au maximum.En bref, les semences de ferme sont soit interdites, soit autorisées en contrepartie du paiement de royalties. De plus, au regard de la loi de 2011, cet usage est strictement limité à l’exploitation de l’agriculteur : est exclue toute possibilité d’échange de semences de ferme protégées par un COV appartenant à un tiers.En dépit de cette réglementation, mes chers collègues, comme vous le savez, peut-être même par expérience personnelle, la majorité des agriculteurs européens a continué à utiliser des semences de ferme sans verser de rémunération aux obtenteurs. Seul le blé tendre a fait l’objet d’une réglementation. 180 http://www.senat.fr/seances/s201303/s20130327/s20130327_mono.html#intv_par_684 9132 38770 loi 2013-03-27 203 2013-03-30 04:13:31 2013-03-30 04:13:31 http://www.nossenateurs.fr/seance/9132#inter_88612db29ec5531f9bb59d08828a2b9c