Document d'origine

18 janvier 2016

Projet de Loi pour la reconquête de la

biodiversité de la nature et des paysages

Discussion au Sénat

Position commune de la CNCPI et de l ASPI

1 Contexte et objectifs

La CNCPI est la profession libérale française spécialisée dans le Droit de l Innovation www cncpi fr

L ASPI est l association des professionnels spécialisés en Propriété Industrielle exerçant en

entreprise www aspi asso fr

Cette position commune de la CNCPI et de l ASPI concerne les dispositions ou amendements

introduits dans ce projet au sujet des droits de Propriété Industrielle

Elle est prise avec un objectif triple :

prendre en compte à la fois la nécessaire libre disponibilité et préservation des ressources

naturelles et l incitation à l innovation et au progrès technique recherchant donc un équilibre entre

ces deux buts parfois contradictoires

proposer un texte clair s appuyant sur une terminologie définie par des textes législatifs et

réglementaires ou par la jurisprudence de façon à faciliter l application de la Loi et sa prévisibilité

assurer une cohérence internationale au moins européenne dans un domaine qui ne connait pas

les frontières

2 Articles concernés

Les deux articles du Projet de Loi principalement concernés sont les articles " après 4 " et

l article 18

a " L article après 4 " est visé par les amendements suivants :

1

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Amt 35 de Mme DIDIER Groupe CRC

Amt 36 de Mme DIDIER Groupe CRC

Amt 46 de Mme DIDIER Groupe CRC

Amt 275 rect de M YUNG Groupe socialiste et républicain

Amt 276 rect de M YUNG Groupe socialiste et républicain

Amt 400 de M GROSDIDIER

Amt 466 de M LABBÉ Groupe écologiste

Amt 467 de M LABBÉ Groupe écologiste

Amt 468 de M LABBÉ Groupe écologiste

Amt 475 de M LABBÉ Groupe écologiste

Amt 508 de M MÉZARD

Amt 509 de M MÉZARD

Amt 510 de M MÉZARD

Globalement ces amendements ont un triple objectif :

En premier lieu exclure de la brevetabilité les produits issus des procédés essentiellement

biologiques

Nous partageons le principe de cet objectif Il nous apparait cependant que les objectifs de ce projet

de loi seraient atteints pour autant que cette exclusion s applique aux animaux et aux végétaux

Or d autres applications des procédés biologiques permettent l obtention de produits utiles et

innovants dont la brevetabilité ne risque pas de porter atteinte à la biodiversité Les exclure de la

brevetabilité limiterait les possibilités d innovation sans raison

L amendement 275 prévoit une modification de l article L 611 19 du code de la propriété

intellectuelle en insérant après le du I un alinéa ainsi rédigé :

" …° Les produits issus de procédés essentiellement biologiques tels que définis au de cet article

"

Nous considérons que l insertion à cet endroit de :

" …° Les produits végétaux ou animaux issus de procédés essentiellement biologiques tels que

définis au de cet article "

permettrait d atteindre les objectifs de ce projet de loi tout en réalisant un juste équilibre réservant

des domaines d innovation Le risque d incompatibilité de ce nouvel alinéa avec la Directive n°98/44

serait ainsi diminué

Par souci de cohérence dans le III de l article L 611 19 du code de la propriété intellectuelle les

mots " du " sont remplacés par les mots " des et …° " de façon à viser également dans ce III le

nouvel alinéa inséré

Nous soutenons donc l amendement 275 modificatif de l article L 611 19 du code de la propriété

intellectuelle sous réserve de la modification proposée ci dessus qui devrait faire l objet d un sousamendement Nous considérons en revanche que les amendements 36 46 466 467 508 et 509

qui visent également une modification de l article L 611 19 du code de la propriété intellectuelle

mais qui de par leur rédaction lorsqu ils diffèrent de l amendement 275 pourraient soulever des

difficultés d interprétation

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En deuxième lieu prévoir que la protection conférée par le brevet ne s étend pas à la

matière biologique obtenue de manière naturelle ou présente naturellement ni à son

utilisation par des procédés essentiellement biologiques

Pour cela les articles L 613 2 2 et L 613 2 3 du code de la propriété intellectuelle seraient

complétés

Les exclusions de la brevetabilité envisagées par ces amendements pour autant qu elles différent de

celles obtenues par la modification de l article L 611 19 CPI prévue plus haut semblent incompatibles

avec la Directive n°98/44 La cohérence de cette disposition avec les autres lois nationales

européennes n est pas établie

Elles seraient très étendues excluant de la brevetabilité par exemple des inventions susceptibles

d être obtenues par des procédés techniques

A notre connaissance l impact potentiel de telles exclusions sur les domaines sans lien avec la

biodiversité la nature et les paysages notamment dans les domaines des sciences de la vie étrangers

au domaine du végétal n a pas été évalué il n a peut être pas été prévu

Nous considérons donc que les modifications des articles L 613 2 2 et L 613 2 3 du code de la

propriété intellectuelle ne devraient pas être retenues et en conséquence les amendements 35

276 468 et 510 ne devraient pas être retenus

En troisième lieu prévoir que le critère de stabilité exigé pour la protection d une variété

végétale par la voie d un certificat d obtention végétale imposerait que " sa semence soit

reproductible en milieu naturel "

Les amendements 400 et 475 proposent pour cela de compléter l article L 623 2 du code de la

propriété intellectuelle

Nous considérons que ces amendements 400 et 475 ne devraient pas être retenus pour la double

raison suivante :

d une part ils introduiraient une condition nouvelle non prévue dans les articles 9 définissant le

critère de stabilité prévus respectivement dans la Convention Internationale pour la protection des

obtentions végétales du 2 décembre 1961 et du Règlement CE 2100/94 du 27 juillet 199 instituant un

régime de protection communautaire des obtentions végétales et ce faisant rendrait le Code de la

propriété intellectuelle non conforme à ces textes internationaux et

d autre part la loi résultante serait difficile à interpréterdans la mesure la notion de semence

reproductible en milieu naturel est une notion arbitraire non objective

b L article 18 est visé par les amendements suivants :

Amt 145 rect de Mme IMBERT

Amt 203 de M PELLEVAT

Ces amendements dont le texte est identique visent à assurer la conformité du projet de loi avec les

accords ADPICS plus particulièrement en ce que la protection conférée par un brevet doit être

assurée pour les produits et les procédés dans tous les domaines de la technologie

Nous approuvons cette recherche d une cohérence rigoureuse et par conséquent nous approuvons

les amendements n°145 et n°203

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L ASPI est une association loi 1901 créée en 1970 pour rassembler l ensemble les spécialistes des

services de Propriété Industrielle de l Industrie française

La propriété industrielle a pour objet la protection et la valorisation des inventions des innovations

et des créations Les activités de l ASPI couvrent à la fois les spécialistes des créations techniques

telles que les Brevets et les Certificats d Obtention Végétale les spécialistes des créations

ornementales que sont les Dessins & Modèles et enfin les spécialistes des signes distinctifs tels que

les Marques

L ASPI a vocation à :

assurer la représentation de ses membres auprès de toutes les autorités nationales ou

internationales

étudier les problèmes de Propriété Industrielle et les questions connexes

entreprendre ou participer à toute action de formation ou de perfectionnement

établir les contacts ou liaisons souhaitables avec des organisations similaires françaises ou

étrangères en vue de la défense des intérêts communs

émettre et suivre tous vœux motions ou suggestions dans le domaine de la Propriété

Industrielle auprès des autorités compétentes

recueillir et diffuser parmi ses membres toutes informations utiles touchant au domaine de

la Propriété Industrielle

L ASPI compte à ce jour plus de 540 membres et l immense majorité des salariés qui dans l industrie

fournissent pour le compte de leur employeur ayant un établissement en France et de ses sociétés

apparentées en France ou dans le monde des services en matière de propriété intellectuelle

Suite aux élections du 12 janvier 2015 au sein du Conseil d Administration la composition du bureau

de l ASPI est la suivante :

Président:

B Carion Taravella société Sanofi

Vice Présidents:

Youen Kerneur société Total et François Xavier de Beaufort société l Air

Liquide

Trésorier:

Pascale Jeune société Orange

Trésorier adjoint:

Jean François Renou société Bolloré

Secrétaire:

Brigitte Ruellan retraité

Secrétaire adjoint:

Karine Berthier société Alcatel Lucent

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Les Conseils en Propriété Industrielle CPI

Une expertise inégalée

Les CPI accompagnent les personnes physiques et morales entreprises et

centres de recherche dans leur stratégie de propriété intellectuelle Ils

participent à l obtention au maintien et à la défense de leurs droits de propriété

intellectuelle en France en Europe et à l international

Les CPI coopèrent avec un réseau d agents étrangers leur permettant d intervenir

en connaissant les évolutions législatives et les pratiques étrangères

Environ 1000 Professionnels qualifiés

Le titre de Conseil en Propriété Industrielle est obtenu sur examen et délivré par

l INPI

Professionnels indépendants les CPI justifient en outre obligatoirement :

d un diplôme national juridique ou scientifique

d un diplôme délivré par le Centre d Etudes Internationales de la Propriété

Intellectuelle CEIPI ou équivalent

d une pratique professionnelle

Les CPI sont mandataires inscrits auprès de l INPI et des offices

européen OEB et communautaire OHMI

Des professionnels soumis à des règles déontologiques strictes

La profession de Conseil en Propriété Industrielle est réglementée pour son accès et

son exercice par la Loi 90 1052 du 26 novembre 1990 et le Décret 92 360 du 1er

avril 1992

Les CPI sont responsables vis à vis de leurs clients

Les CPI respectent le secret professionnel

Les CPI s interdisent le conflit d intérêt

La CNCPI une force motrice pour développer la culture de la

propriété industrielle en France

La Compagnie Nationale des Conseils en Propriété Industrielle CNCPI est l unique

organisme professionnel institué par le Code de la Propriété Intellectuelle qui

représente la totalité des CPI professionnels libéraux français exerçant sur le

territoire

La CNCPI :

représente la profession de Conseil en Propriété Industrielle auprès des

pouvoirs publics des organismes nationaux et internationaux des

représentants des entreprises des créateurs et du public

s assure du respect des règles déontologiques

développe et promeut la propriété industrielle et la culture de

l innovation en France en participant et en organisant des

manifestations

L appartenance à la CNCPI constitue une garantie de compétence

d indépendance et de moralité

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62669a91719c07718efe161049a50f08

Monsieur le président monsieur le ministre mes chers collègues au regard des débats quasi consensuels intervenus en commission des affaires économiques le groupe CRC n a pas souhaité par conviction s associer à un consensus qu il ne peut partager compte tenu des positionnements éthiques et des dangers de ce texte Il m appartient de mettre en lumière et en perspective le paysage inquiétant que prépare le COV en matière de propriété intellectuelle dans le domaine végétal Le certificat d obtention végétale est présenté dans ce texte comme une version soft et acceptable en comparaison du brevet qui irrémédiablement fait appel à la notion très controversée en France de la brevetabilité du vivant Le certificat d obtention végétale se distingue du brevet d une part par la procédure de reconnaissance d une variété nouvelle expérimentée en plein champ et d autre part par les possibilités d utilisation par des tiers de la variété pour en créer de nouvelles Nous ne sommes pas contre le principe même du certificat d obtention végétale et d une rémunération par les agriculteurs du coût de la recherche mais les modalités vont à l encontre de notre vision des choses Le texte renforce le certificat d obtention végétale en prolongeant sa durée donnant droit à la contribution volontaire obligatoire Vingt cinq ou trente ans c est énorme quand on sait que en cinq ans il est créé presque autant de nouvelles variétés que celles qui sont mises à la disposition des agriculteurs : 600 nouvelles variétés sont créées chaque année 5 000 sont à leur disposition Il serait préférable de réduire la durée des certificats d obtention végétale à cinq ans par exemple ou de faire payer une seule fois l agriculteur qui acquiert les semences ou les plants La rente des obtenteurs sur une période aussi longue ne garantit en rien le réinvestissement dans la recherche Il aurait d ailleurs été intéressant de disposer de chiffres permettant de mesurer le retour en investissements de la recherche dans le secteur privé Par ailleurs considérer le recours aux semences de ferme comme une tolérance est intellectuellement choquant au regard des pratiques qui remontent à l origine même de l agriculture Le vivant est par nature reproductible et la liberté de chacun doit être respectée L amélioration des rendements exigés par les politiques agricoles successives a conduit à l appropriation progressive de variétés nouvelles par une minorité soucieuse de renforcer son monopole à travers ce texte qui favorise essentiellement les obtenteurs De surcroît le jeu conjugué des obtenteurs et de la grande distribution a le plus souvent conduit à un appauvrissement du nombre de variétés et des qualités gustatives des produits pour répondre à des normes commerciales Par ailleurs nous demandons que à l instar des négociations qui ont abouti à l accord de 2001 le nombre d espèces concernées aujourd hui limité par décret à vingt sept soit élargi à toutes les espèces végétales cultivées en France Il semble donc urgent de rassembler tous les syndicats agricoles sans exception et la Coordination nationale pour la défense des semences fermières la CNDSF autour d une table pour négocier de façon équitable les intérêts de chacun Le texte établit à l échelon national une situation de dépendance des agriculteurs qui produisent plus de quatre vingt douze tonnes de céréales par an Nous ne possédons pas de chiffre plancher pour les autres productions végétales Que pèseront demain ces obtenteurs face aux géants mondiaux que sont les DuPont Pioneer et les Monsanto qui pourront aisément racheter ces COV pour les convertir en brevets ou simplement imposer le style Terminator traduction même de la dépendance totale Cheval de Troie du brevet le certificat d obtention végétale cache la marchandisation du vivant et privilégie la suprématie de grands groupes dans la guerre alimentaire qui se prépare au niveau mondial Demain il faudra nourrir près de dix milliards d humains : les enjeux sont phénoménaux et particulièrement excitants pour ceux qui font de l argent leur raison de vivre Les enjeux médicaux et énergétiques liés aux productions végétales sont également gigantesques Il n y a qu un pas pour que les organismes génétiquement modifiés et leurs brevets " en béton " deviennent la règle sur la planète Certes les organismes génétiquement modifiés sont bannis de ce texte pour ne pas effrayer mais nous savons tous qu ils sont présents dans tous les esprits et que leurs promoteurs ne sont pas des philanthropes soucieux de nourrir le monde de le soigner de lui fournir son énergie de demain Dans son rapport 235 datant de 2004 déposé au titre de l office parlementaire des choix scientifiques et technologiques et relatif aux conséquences des modes d appropriation du vivant sur les plans économique juridique et éthique le député Alain Claeys précise je le cite : " Le développement de l appropriation du vivant entraîne pour l agriculture une transformation du fonctionnement de son régime d innovation susceptible d affecter le métier d agriculteur " Jusqu au milieu des années 1970 les acteurs de l innovation en agriculture étaient essentiellement les instituts publics ou parapublics de recherche et des acteurs privés très proches de la production agricole Les relations entre ces intervenants ne faisaient intervenir que fort peu les questions de rentabilité financière L augmentation de la production était alors prioritaire pour le pays " L INRA principale source de l innovation dans ce domaine transférait le plus rapidement possible ses découvertes C est ainsi comme me l a rappelé M Guy Paillotin que l INRA avait purement et simplement donné les hybrides de maïs à Limagrain et qu il avait beaucoup travaillé avec la firme Vilmorin sur le blé " Cette époque était aussi celle existait un réel souci de circulation des ressources génétiques dans l optique de favoriser la mise au point de variétés à rendements élevés Cette volonté de favoriser l innovation avait abouti à élaborer le système du certificat d obtention végétale " La situation a considérablement évolué avec l entrée des firmes pharmaceutiques sur le marché des semences Celles ci maîtrisaient un certain nombre de techniques et notamment celles du génie génétique mais étaient dépourvues de collections variétales Ces collections indispensables pour créer de nouvelles variétés étaient le patrimoine des entreprises semencières la plupart du temps des sociétés petites ou moyennes " Ces dernières ont donc été progressivement rachetées avec leurs collections par ces grandes entreprises de la chimie et de la pharmacie Certaines de celles ci se sont alors de cette façon transformées au début des années 1990 en " groupes de science de la vie " Cette appellation était destinée à englober leurs activités pharmaceutiques qu elles conservaient et leurs nouvelles activités semencières " Mais ce faisant ces grandes entreprises introduisirent dans ce secteur semencier le brevet qu elles avaient l habitude d employer dans leurs activités pharmaceutiques " L application des techniques du génie génétique en agriculture a entraîné l utilisation du brevet comme mode de protection de l innovation dans ce domaine Ces transformations du régime de propriété des ressources végétales induiront certainement un changement du métier d agriculteur " Ces évolutions sont essentiellement dues aux plantes génétiquement transformées dont la culture s étend actuellement sur 67 millions d hectares dans le monde dont 47 millions aux États Unis Les semences de ces plantes sont toutes brevetées Les agriculteurs deviennent donc des licenciés des entreprises détentrices des brevets des plantes génétiquement transformées " Ce passage est assez évocateur Ce débat met également en évidence les faiblesses de la recherche publique qui devrait être le pivot de la mise au point des variétés végétales dont notre société a besoin comme cela était le cas il y a quelques dizaines d années L actualisation des règles juridiques applicables dans notre pays et la ratification de la convention UPOV visent avant tout à prolonger les privilèges des obtenteurs La proposition de loi inscrite à l ordre du jour du mercredi 8 février 2006 tendant à prolonger la durée de certains certificats d obtentions végétales en témoigne de façon éloquente Le recours aux semences de ferme et le triage à façon n offrent pas de garanties suffisantes à nos yeux pour les exploitants La recherche publique n est pas dotée de moyens suffisants Tout cela nous amène à rejeter ce texte qui s il est adopté relancera une bataille dans nos campagnes Le rapport de forces qui s établira nous dira l avenir Il aurait été préférable de régler ces différends en amont Ni de mauvaise foi ni purement idéologique notre vue à moyen et long terme des dangers de toute forme d appropriation du vivant et de marchandisation systématique nous conforte dans notre position à l égard à ce texte

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http://www senat fr/seances/s200602/s20060202/s20060202_mono html#int134

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loi

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2011 11 05 22:55:19

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http://www nossenateurs fr/seance/120#inter_62669a91719c07718efe161049a50f08